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Chasse aux migrants, délit de solidarité : vous avez dit “humaniser” ?

jeudi 5 mars 2009

Lors de l’entretien qu’Eric Besson avait accordé aux associations impliquées dans l’aide aux migrants à la Sous-préfecture de Calais et dont faisait partie la délégation régionale de la LDH, le Ministre avait déclaré avoir été ému par sa rencontre avec des migrants dans la “jungle”. Il avait ajouté aussitôt qu’il souhaitait mettre en place une politique de fermeté en rendant Calais complètement étanche, tout en prétendant vouloir “humaniser” cette même politique (sic). Depuis lors, le président de la section de Calais a rencontré une délégation du HCR (Haut Commissariat aux réfugiés) venue sur les lieux. Il a notamment abordé la question très préoccupante de la prise en charge des mineurs.

Si certains pouvaient encore se bercer d’illusions, aujourd’hui la brutalité des mesures prises jette une lumière crue sur les réalités de la politique gouvernementale. On sait que l’une des premières initiatives du Ministre a consisté à proposer la délivrance d’un titre de séjour (provisoire !) en échange d’une dénonciation des passeurs. Vouloir s’attaquer aux réseaux maffieux qui exploitent la misère des migrants est sans doute louable mais la proposition de Monsieur Besson a aussitôt suscité réprobation et consternation : cette circulaire est extrêmement dangereuse pour les migrants et leurs proches, elle est choquante au regard de l’éthique républicaine puisque la délation y est présentée comme un acte de civisme. En outre il ne s’agit plus dès lors de respecter un droit mais d’accorder en quelque sorte une récompense, une prime à la dénonciation !

Tout récemment 14 personnes ont été arrêtées à Norrent-Fontes, près de Lillers, dont 13 migrants originaires d’Erythrée et une bénévole, mère de famille de 59 ans dont la maison a été perquisitionnée et qui a été retenue pendant huit heures d’affilée. Un autre militant de Boulogne-sur-mer a été arrêté le même jour pour les mêmes raisons. Tous deux ont été interrogés dans le cadre d’une affaire “d’aide au séjour irrégulier en bande organisée”.

Cette situation ne peut plus durer ! Il y a quelque temps déjà la LDH avait lancé au niveau national un “appel à l’insurrection des consciences” : il est plus que jamais d’actualité. Nous ne pouvons tolérer plus longtemps dans ce pays qui se targue d’être la patrie des droits de l’Homme que soient ainsi bafoués des droits fondamentaux, en particulier que soient traités comme des criminels des personnes qui ne font qu’obéir à leur conscience quand elles cherchent à porter assistance à des hommes et des femmes qui ont dû fuir leur pays et qui sont actuellement en danger, complètement démunis et à qui on dénie toute dignité humaine. Ce “délit de solidarité” est une honte nationale !

La délégation régionale et la fédération du Pas-de-Calais de la LDH expriment tout leur soutien et toute leur sympathie aux victimes de cette scandaleuse répression ; elles demandent que cessent toutes les poursuites engagées contre elles.

Il est urgent que la France et l’Union Européenne ratifient et appliquent la Convention des Nations Unies sur la protection des droits de tous les migrants.

Urgent que la situation des migrants soit enfin traitée avec tout le sérieux qu’elle mérite dans le respect des droits de l’Homme à l’échelon national et européen.

Urgent que les citoyens s’engagent pour soutenir les associations, mais aussi que les élus prennent leurs responsabilités et apportent des réponses politiques autres que la répression et la fermeture des frontières pour que cesse enfin cette escalade insensée !

Délégation régionale de la Ligue des droits de l’Homme Nord-Pas-de-Calais.
Arras le 2 mars 2009