La Ligue des droits de l’Homme dénonce le démantèlement progressif du
dispositif institutionnel de laïcité au sein d’une République laïque selon sa propre Constitution.
L’accord signé par le ministre des Affaires étrangères et l’Etat du Vatican en janvier 2009, mis en oeuvre par le décret* du 16 avril, aboutit à reconnaître la validité des grades et diplômes délivrés en France également par les établissements d’enseignement dépendant de la Congrégation pour l’Education catholique.
Ceci contrevient à la loi de 1880 et à la loi Savary de 1984 réservant aux
établissements publics le monopole de la collation des grades, dont le
premier est le baccalauréat, et des titres universitaires, alors même que par ailleurs existe la liberté de l’enseignement.
Ceci contrevient aux dispositions de la Constitution donnant à l’Etat le
devoir d’organiser l’enseignement public et d’en fixer par la loi les principes fondamentaux dont fait partie la reconnaissance des grades et titres universitaires, qui rend le savoir universitaire et sa reconnaissanceindépendant de toute considération religieuse.
Ceci contrevient, par sa procédure de mise en oeuvre – par décret
d’application –, aux dispositions de la Constitution imposant sa ratification par une loi puisqu’il modifie une disposition de nature législative.
Ceci contrevient à l’article 2 de la loi de 1905 stipulant que l’Etat ne
reconnaît aucun culte et ne peut donc attribuer à une autorité religieuse une prérogative de puissance publique.
Ceci contrevient à l’esprit de cette même loi établissant la neutralité de l’Etat envers les différents cultes en réservant de fait à l’un d’entre eux une telle prérogative, ce qui est contraire au principe fondamental de l’égalité entre tous les citoyens quelles que soient leurs convictions.
Ces atteintes volontaires et provocatrices à la laïcité sont des mauvais coups et des régressions irresponsables et incohérents qui visent uniquement à instrumentaliser les croyances religieuses à des fins de domination politique et sociale, à se créer des clientèles en opposant entre elles les religions très inégales quant à leurs réseaux scolaires et universitaires. De plus elles ne peuvent qu’exaspérer l’opposition entre celles et ceux qui s’y reconnaissent et celles et ceux, nombreux aujourd’hui, pour qui elles ne signifient plus rien, bref à déchirer un peu plus un tissu social déjà fragilisé.
La Ligue des droits de l’Homme s’oppose à ce coup de force et s’associe aux démarches de nature à aboutir à son annulation. Elle appelle à agir
vigoureusement contre le démantèlement systématique de la laïcité.
Résolution d’urgence du 85ème Congrès de la LDH, 1er juin 2009
* Décret portant application de l’accord entre la République française et le Saint-Siège sur la reconnaissance des
grades et diplômes dans l’enseignement supérieur signé à Paris le 28 décembre 2008, paru au JORF n°009 2 du
19 avril 2009.